13 novembre 2010

J'ai voulu te donner un tract... C'est ton mec qui l'a pris !


Pour préparer notre magnifique manifestation contre la fermeture des centres IVG, nous avons bien du informer, avertir, « propagander », donner rendez-vous à toutEs. Nous avons donc distribué notre tract à la fac, sur les marchés et dans la manif' inter-pro du 6 novembre. Nous avons principalement avertit les femmes, puisque l'Interruption Volontaire de Grossesse est une des conditions pour la libre disposition de notre corps, donc ce sont bien, nous, les femmes qui sommes les premières concernées ! (je ne connais pas beaucoup d'homme ayant avorté... ) Mais que n'avions nous pas fait !!!




Mise en situation :
Je m'approche d'un groupe de manifestants, des hommes et des femmes discutant en attendant le départ de la manif' contre la réforme des retraites. « Bonjour, aujourd'hui à 19h, il y a une manif' pour la défense du droit à l'avortement ! » et je tends mon tract aux femmes MAIS étrangement ce sont les mecs qui le prennent.... POURQUOI ?

Voici quelques hypothèses :
-C'est pas aux femmes qu'on donne les tracts, elles savent pas lire...
-La politique c'est une affaire d'Hommes !
-C'est l'homme qui dit si on va à la manif ou pas.
-Pourquoi ça ne concernerait qu'elle ?
-Qu'est-ce qui se trame dans notre dos, à nous les hommes ?

Voilà tout ce que j'ai imaginé comme raison pour justifier cet acte incroyable de la prise de tract par l'Homme lorsque je le donne aux femmes ! Et même lorsqu'elles le prenaient, instinctivement, les hommes regardaient par dessus l'épaule comme pour vérifier ce qu'il y avait de si important qu'ils ne pouvaient pas voir. Généralement, ils finissaient par m'en demander un, comme un parent qui vérifierait ce que ses enfants lisent. Une sorte de curiosité autoritaire, une censure masculine ?

Tout cela pour rappeler que le combat est vraiment loin d'être inutile et que lorsque nous imprimons des autocollants avec le slogan : « Pas d'utérus, pas d'avis » ce n'est pas pour faire joli !

Aurore

10 commentaires:

  1. Ou tout simplement, cet homme voulait savoir ce que c'était ce rassemblement ou bien ce mâle il est tout simplement solidaire de cette lutte qui ne touche pas que les femmes (loi bachelot et avortement?)

    A force de voir du machisme partout, on ne voit plus que ce qu'on veut voir...

    aspartam

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  2. D'accord avec aspartam. Pourquoi ce serait interdit aux hommes de lire ce tract ? Certes, ils auraient pu en demander pour eux au lieu de prendre ceux de leurs femmes. Pourquoi ne pas leur avoir demandé pourquoi ce tract les intéressait ?

    Je suis par ailleurs d'avis que le droit à l'avortement concerne parfaitement les hommes : les géniteurs d'un enfant sont tout autant responsables l'un que l'autre.

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  3. j'ais vérifié ce genre d'attitude certainement sexiste lors de la journée des Jardins (portes ouvertes du centre de réinsertion par l'agriculture biologique) où figurez-vous que j'ais constaté qu'au moment d'aller chercher la tarte flambée dans la fumée, la queue et les jambes lourdes ce sont les femmes d'une délégation socialiste invitée d'honneur accompagnée de son député européen qui s'en sont chargées tandis que ces messieurs étaient déjà attablés cigarette aux lèvres et bouteille de pinot noir déjà ouverte... faut dire que le discours qui s’étalait en longueur rendait l'assemblée fatiguée et les orateurs eurent la gorge sèche...
    Alors question, pareille... pourquoi c'est aux femmes de prendre la file d'attente et d'apporter sur un plateau la boustifaille à ces messieurs tandis qu'ils trinquent déjà sans elles ? Parce qu'elles sont volontaires ou par tradition ? pfff... dégoûté... au début avec un collègue on rigolait puis on a très vite trouvé ça dégueulasse

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  4. Tout d'abord, nous tenons à préciser qu ce qui est critiqué dans cet article n'est pas la curiosité des hommes, mais bien le fait qu'ils prennent le tract "à la place de...". C'était un choix politique de notre part de nous adresser principalement aux femmes, puisque ce sont elles les premières concernées par la fermeture des centres qui pratiquent l'IVG. Quant au slogan "pas d'utérus, pas d'avis", il veut bien dire qu'il est impensable que des hommes décident à notre place d'avoir ou non recours à une Interruption VOLONTAIRE de Grossesse.
    Notre corps, notre liberté, notre choix !
    Nous sommes très heureuses que des hommes soient solidaires de notre lutte, mais ils ne pourront jamais nous libérer à notre place : "Ne me libère pas, je m'en charge" était un des premiers slogans du MLF... et reste, à notre avis, d'actualité !

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  5. Je suis toujours intrigué par cette idée : "mais ils ne pourront jamais nous libérer à notre place". Le féminisme n'est-t-il pas un combat qui engage toute l'humanité, tout comme la lutte contre le racisme ou le spécisme ?

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  6. J'ai bien dit "responsabilité", pas "pouvoir décisionnel".

    Je veux dire par là qu'unE enfant, qu'il/elle soit vouluE ou non, qu'on décide d'avorter ou non, se fait en général (sauf exceptions, je sais) à deux, habituellement une personne de sexe mâle et une personne de sexe femelle (sans tenir compte de leurs genres, bien sûr), et que les deux géniteurs/-trices ont au départ une responsabilité (je ne parle pas de pouvoir !) égale là-dedans.

    Partant de là, je trouve dangereusement imprécis le slogan "pas d'utérus, pas d'avis" : c'est facile de vouloir le comprendre autrement que vous en niant toute responsabilité, autant pour la grossesse que pour un avortement, du géniteur mâle. "Pas d'utérus, pas de pouvoir décisionnel sur mon corps" : oui. Mais "pas d'avis" ça déresponsabilise trop, je trouve, et ça en devient contre-productif : car l'avis (pas le pouvoir !) des géniteurs mâles, et donc leur engagement responsable, me semble souhaitable si on vise l'égalité entre les sexes et les genres dans la parentalité.

    Pour ce qui est de votre choix politique de vous adresser principalement aux femmes parce qu'elles sont les premières concernées par les femetures de centres d'IVG : ok, mais comment voulez-vous savoir si tel partenaire de telle femme ne s'en sent pas concerné ? (je vous garantis qu'un tas d'hommes seraient autant emmerdés que leurs partenaires femmes par de telles femetures, parce qu'ils ne désirent pas plus être pères que leurs partenaires ne désirent être mères). Il m'aurait semblé logique de distribuer vos tracts systématiquement aux deux, quitte à provoquer des débats contradictoires.

    Et ce n'est pas une question de vouloir libérer les autres de force.

    Bref, avortement libre et gratuit pour toutes : oui, bien sûr. Mais pas en déresponsabilisant les hommes.

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  7. @Oxygene : Nous pensons qu'au vu de la conjoncture actuelle, il est primordial et prioritaire de convaincre d'abord et surtout les femmes d'entrer dans la lutte pour elles-mêmes et par elles-mêmes.

    @GouineMum : Le slogan "pas d'utérus, pas d'avis" concerne l'acte de recourir à une IVG. Il ne s'agit pas de parler de parentalité, car dans ce domaine nous sommes bien d'accord pour résponsabiliser les hommes un maximum (contre la double journée de travail des femmes, pour le partage des tâches comme en matière de parentalité...). Les femmes qui tombent enceintes sont encore très largement victimes de pressions morales voir physiques, qu'elles veuillent avorter ou non. Ainsi, notre choix de nous adresser principalement (et non exclusivement, nous n'avons jamais refusé un tract à un homme) aux femmes est motivé par la nécessité de les convaincres en priorité que c'est un choix (le choix de recourir à une IVG) qui finalement appartient à elles seules.
    Nous dénonçons l'attitude paternaliste à laquelle nous avons eu à faire de la part de certains hommes qui allaient jusqu'à arracher le tract des mains de leur compagne. Nous ne dénonçons pas la curiosité et l'implication de certains hommes dans la lutte, mais nous maintenons que la lutte féministe doit d'abord être la lutte des femmes elles-mêmes.

    Nous tenons à préciser que cet article n'est pas né de rien, l'attitude décrite a été majoritaire et que si nous n'avions rencontré que des hommes curieux, ou interessés, nous n'aurions pas écrit ces mots. Malheureusement, ce n'est pas ce qui s'est passé, loin de là...

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  8. J'ai un peu de mal à voir comment on peut séparer l'IVG de la parentalité (qu'elle soit choisie ou involontaire car conséquence p.ex. d'une impossibilité d'IVG) : ce n'est comme dit pas plus agréable de se retrouver père malgré soi que mère malgré soi, et je pense qu'on doit aussi avoir le droit de refuser d'être père, comme celui de refuser d'être mère.

    Je pense donc qu'une décision d'IVG devrait être portée d'un commun accord (!) par la génitrice _et_ le géniteur (si le géniteur est présent : le cas est bien sûr différent s'il s'agit d'une femme abandonnée par le géniteur ou violée p.ex.). Bref, je ne vois pas en quoi le fait d'être, par la force de la biologie, seule à être enceinte conférerait un droit exclusif sur ce qu'on fait de sa grossesse, en tout cas aussi longtemps qu'il y a présence du géniteur et que celuci-ci se sent concerné.

    (bien sûr tout cela ne justifie en rien que des hommes piquent vos tracts a leurs femmes, pour en revenir au début du débat ; mais j'essaie de montrer que les implications ne sont pas aussi simples qu'elles en ont l'air)

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  9. Une réflexion supplémentaire :

    J'ai l'impression que dans ce débat rôde un concept sous-jacent, peut-être inconscient : celui de propriété, "à qui appartient l'enfant".

    Quand elle était enceinte il y a quelques années, une amie m'a dit à peu près : "Ce n'est pas _mon_ enfant, il ne m'appartient pas. Cet enfant vient de quelque part, passe par moi, et ira ailleurs. Je l'accompagne juste sur un bout de son chemin." Je trouve ça très intéressant comme approche.

    Je pense qu'un enfant n'appartient à personne, ni à son géniteur ni à sa génitrice, ni à qui que ce soit d'autre. Et que personne ne possède donc un quelconque droit préférentiel sur lui.

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  10. Tout à fait d'accord avec l'idée de ce commentaire : un enfant n'est la propriété de personne. Cela dit il me semble que l'on s'éloigne un peu du sujet. Une fois encore il n'est pas question dans cet article et avec ce slogan, de parler de "parentalité" mais bien de la libre disposition de nos corps. Pour le dire vite, il ne s'agit pas de se demander à qui appartient le "contenu" mais plutôt de revendiquer la libre disposition du "contenant"...

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