16 mai 2011

Comment les victimes deviennent les coupables, ou le traitement médiatique des violences faites aux femmes: l'exemple de l'affaire DSK



L’encre coule et la salive dégouline à propos de l’enième affaire « Strauss-Kahn ». Complot ou pas complot telle semble être la question qui agite le débat public. Que ce soit au bistrot du coin, dans la « classe politique » ou dans les grands médias, l’euphémisme le dispute à l’ouvertement sexiste,  le médiocre côtoie le stupide.


Le but de cet article n’est pas de disserter sur l’innocence ou sur la culpabilité de DSK : il est présumé innocent jusqu’à ce qu’un-e juge américain-e dise le contraire. Non, le but de cet article est de s’interroger sur les réactions – et elles sont nombreuses – que provoque cet « incident », pour paraphraser quelque journaliste. La lecture de la presse ou l’écoute des ondes depuis hier ne peut que faire frémir et donne selon moi une idée assez nette de la vision que l’on a du viol (et plus largement des violences contre les femmes) en France : une vision qui occulte totalement les femmes victimes de violences pour se concentrer sur l’agresseur (soupçonné ou avéré). Parce que, finalement, qu’elles hurlent ou non complot, les réactions françaises à cette affaire ont ceci de commun que, d’une part elles euphémisent systématiquement l’acte de viol et que, d’autre part elles partent du principe que la victime ne dit probablement pas la vérité. Or, que DSK soit juridiquement présumé innocent ne justifie en aucun cas que l’on considère la femme qui l’accuse comme une présumée menteuse.


Des réactions qui oscillent entre l’euphémisme, le sexisme prononcé et le simplement odieux


Nauséabond. Voilà le terme que m’inspire la lecture des innombrables coupures de presse au sujet de cette affaire. L’ensemble du traitement médiatique est entièrement orienté vers DSK, le FMI, l’élection présidentielle qui se profile, la France ou encore la stabilité de la zone euro. Force est de constater qu’il est fait peu de cas de la victime en particulier, de la question du viol plus généralement. Comme si ce n’était pas de cela qu’il s’agissait. On a parfois l’impression que DSK est simplement accusé d’avoir piqué une pomme en quittant l’hôtel. A tel point que l’on n’est presque pas étonné de lire sur le site du Point hier soir le mot « victime » mis entre guillemets ! On parle volontiers du « cauchemar » de DSK, de la « violence » qu’il subit. Je ne doute pas que « la femme de ménage » qu’il a peut-être violée passe des moments forts heureux à l’heure qu’il est. D’ailleurs, le recours presque systématique  au terme « femme de ménage » pour désigner cette femme, au pays de la langue de bois (inventeur entre autres des termes comme « technicienne de surface » ou « mal voyant ») est assez symptomatique de la volonté à peine masquée de la dévaloriser.

Quand la victime n’est pas celle que l’on croyait, tout devient possible. Manuel Valls va jusqu'à dire, dans un élan lyrique, que les images de DSK sont « d’une cruauté insoutenable ». En voilà un qu’on a pourtant rarement entendu s’émouvoir sur le sort réservé aux suspects dans notre doux pays. Et Eva Joly de s’indigner de « la violence de la justice américaine » et on la comprend tant il est vrai que les délinquants présumés sont bien traités en France. Quand les militants du dimanche s’inquiètent tellement des résultats d’une présidentielle qu’ils en oublieraient même qu’ils sont censés être au moins un peu féministe, ça fait chaud au cœur. Pour celles d’entre nous qui avaient encore des illusions… Libération n’hésite d’ailleurs pas à titrer « immense gâchis » à propos de la candidature-probablement-tombée-à-la-flotte de DSK.

On papote, on papote, salops d’américains, vraiment trop puritains. Et l’on se réjouit à demi-mots qu’en France, terre de l’amour s’il en est, un tel barouf ne serait jamais arrivé. C’est qu’on sait préserver nos hommes politiques nous. C’est vrai qu’outre atlantique une accusation de viol n’est pas prise à la légère mais ce n’est pas de leur faute les pauvres, ils ne connaissent rien à la séduction à la française. Séduction insistante, qui peut visiblement se passer de consentement et nécessite quelques mains baladeuses mais c’est tellement plus spontané, plus romantique voyez-vous mon bon Monsieur.

Parce que, le fait que DSK ait été mis en cause dans plusieurs affaires de ce genre ne semble pas inviter ses défenseurs à la prudence. C’est de la drague à la française nous dit-on. « Homme vigoureux » certes, nous dit Christine Boutin, violeur, impossible. Et on sait précisément où ce situe la frontière nom d’un chien. Et si on ne sait pas, ce dont on est visiblement assez certain au Pays des Petits Malins que semble être devenue la scène politique française, c’est que cette frontière, DSK ne l’a pas franchie, jamais.  Bref, qu’il puisse être un séducteur insistant on veut bien l’admettre… quant à considérer qu’il puisse s’agir de harcèlement ou de violences sexuelles personne dans la classe politique ne semble près à seulement l’envisager.  Nathalie Kusciusko-Morizet en oublie même que dans un viol il y a nécessairement une personne à laquelle on a fait subir des attouchements sexuels auxquels elle ne consentait pas : elle n’hésite pas à dire que dans cette affaire la « victime avérée » c’est … la France !


Un traitement médiatique représentatif de celui de l’ensemble des violences  contre les femmes

Ces réactions inspirent deux remarques.
  
La première c’est le silence qui entoure les violences, notamment sexuelles en France. Quand on en parle c’est à l’occasion d’un fait divers malencontreusement médiatisé et c’est le plus souvent pour entendre s’exprimer quelque suspicion à l’égard de la victime :

Comment était-elle habillée ? A-t-elle dit NON ou l’a-t-elle simplement chuchoté ? Peut être n’a-t-elle rien dit ? Parce que, qui ne dit mot consent n’est-ce pas ? L’a-t-elle ou non cherché ? Etait-elle seule dehors à une heure tardive ? Est-elle responsable ?

La seconde c’est la manière dont sont traitées les violences contre les femmes en France : par-dessus la jambe. Harlem Désir se fait d’ailleurs une joie de nous le rappeler : il s’agit là « d’une affaire privée, pas politique ». Circulez, y’a rien à voir.

Le traitement de cette affaire n’est d’ailleurs pas sans rappeler ce à quoi nous avions eu droit lors du meurtre de Marie Trintignant par Bertrand Cantat ou encore après l’affaire Polanski et dans quasiment toutes les affaires de violences. On observe alors de façon récurrente que les trois mêmes mécanismes à l’œuvre :

-          recours à tous les euphémismes possibles (un incident, une bagarre, une dispute, une relation, un événement)
-          dévalorisation et recherche de la faute de la victime (une droguée malheureuse ayant des rapports compliqués avec sa famille, une adolescente provocante qui pose nue, une femme désorientée un peu hystérique)
-          défense acharnée du coupable (un amoureux transi à fleur de peau, un grand artiste, un homme travailleur pour qui sa famille compte plus que tout)

Plusieurs campagnes  féministes contre les violences plus tard, on ne peut qu’être despéré-e-s de voir que rien n’a changé. C’est la personne inculpée qui est victimisée, défendue à corps et à cri. La victime est dévalorisée, soupçonnée quand elle n’est pas rendue invisible et l’accusation de viol est allègrement passée sous silence. On l’a qualifie plus volontiers de « piège », « d’évènement invraisemblable » ou encore de « peau de banane ».  D’ailleurs tellement peu d’attention est portée aux dires de la victime (comme de celles du passé d’ailleurs, il suffit d’observer la réaction d’Ardisson dans cette vidéo http://www.lepost.fr/article/2011/05/16/2496134_affaire-dsk-et-la-victime-alors.html et la façon dont elle-même se justifie en précisant la manière dont elle était habillée) que l’on en vient à l’oublier. A oublier qu’il y a une autre personne dans cette affaire. Que la vie de quelqu’un d’autre se joue. Certes, il  ne s’agit que d’une femme, de ménage qui plus est…

Complot orchestré par la droite contre le PS, piège de quelque malfaisant contre DSK… Cette affaire est donc traitée pour tout sauf pour ce qu’elle est : une histoire de plus ou les femmes et les violences qui leurs sont faites sont occultées au bénéfice de l’honneur de la France, de la grandeur d’un homme politique, de l’enjeu d’une élection présidentielle. Et pendant que tout le monde se dit que cette femme ment probablement, personne ne se demande : et si elle disait la vérité ? Que va-t-il lui arriver à elle ? Mesdames, visiblement il nous faudra faire encore un effort pour être entendues, prises au sérieux et considérées comme des personnes dont la vie a quelque importance.
L’essentiel est oublié : en général dans ces affaires il y a une victime et un coupable. Ne les confondons pas.

Marie




27 commentaires:

  1. http://www.crepegeorgette.com/2011/05/17/le-viol-et-nous/comment-page-1/#comment-14483

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  2. Il est vrai que le traitement médiatique sur DSK est excessif est peut être un peu trop orienté. Cependant il y a des points sur votre article qui me gêne un peu, notamment sur la présomption d'innocence. Les affaires de viols et d'agressions sexuelles sont toujours hautement sensible. Il est vrai qu'il y a une difficulté pour les victimes de porter plainte. D'autant plus que dans ce genre d'affaires il faut non seulement porter plainte, mais le faire vite, pour éviter d'arriver au problématique parole contre parole.

    Mais quitte à être choquant, si il y a des présumé innocent, il y a forcément des présumés victimes. La présomption d'innocence est quelque chose d'intangible et je ne dis pas ça pour défendre DSK. C'est parce que c'est un principe fondamental dans un État démocratique. Alors oui ça sera à la victime de prouver qu'elle a été victime, c'est peut être choquant mais on ne peut pas faire autrement. Donc parler de "victime avérée" c'est déjà prendre position dans une affaire en cours en désignant l'autre comme "agresseur avéré", et là on ne respecte plus la présomption d'innocence.

    Ensuite, quand vous dites qu'il a déjà été mis en cause dans des affaires de ce genre, je suis désolé mais pour le moment il n'a pas été mis en cause dans une telle affaire. Peut être des personnes vont se déclarer vu que la peur va changer de camp. Cependant le fait d'être un séducteur avéré, voire un mec lourd, con, irrespectueux avec les femmes, goujat ou tout ce que vous voulez, n'en fait pas mécaniquement un violeur. Et il faut être vigilant aux préjugés et aux à priori moraux dans les affaires de mœurs. Parce que l'erreur judiciaire est aussi très vite arrivé. Citons l'affaire d'Outreau : on a des familles, pauvres, sans emplois, dans le Nord et paf on en fait mécaniquement des pédophiles. Résultat : la plus grande erreur judiciaire de la décennie.

    Ensuite je vais encore choquer, mais les affaires de droit commun son des affaires privées. Ça se règle dans les tribunaux, le coupable étant condamné, et la victime indemnisée. Le coté trainer les coupables dans la boue, en faire les gros titres, les lyncher sur la place publique, ça me fait penser à une justice d'un autre âge. C'est pour ça que je trouve que normalement les médias ne doivent pas s'en mêler, et d'ailleurs, j'en ai marre de cette affaire DSK. Laissons la justice opérer, si il est coupable, il ira en taule et tant mieux ça fera un prédateur en moins. Sinon il sera libéré, et voilà.

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  3. Je me permet de vous conseiller de relire l'article. A aucun moment je ne me prononce sur la question de la culpabilité ou de l’innocence de DSK. J'annonce même au préalable que tel n'est pas le sujet de l'article. A aucun moment je ne prétend que la femme qui a portée plainte est une victime avérée. Je constate juste qu'elle est traitée dans la presse comme une présumée menteuse, ce qui est différent. De la même façon, je dit à aucun moment que DSK a été mis en cause dans une affaire identique, mais dans des affaires du même style, c'est à dire qui posent la question du consentement des femmes qui ont eu affaire à lui. Ce n'est pas la même chose.
    Je ne pense pas qu'on puisse comparer cette affaire avec celle d'Outreau, puisque ce que je tente de mettre en avant c'est le fait que tout le monde agit comme s'il était impossible qu'il soit coupable. On ne présume même plus de son innocence on en est certain.La situation des accusés d'Outreau, outre le fait qu'ils n'étaient ni riches, ni puissants, étaient tout à fait inverse.
    Ensuite , je trouve que vous recourrez vous même à l'euphémisme... Qualifier une affaire de violences sexuelles d'affaire de moeurs me semble un peu léger. Enfin, une affaire de violence sexuelle (sans se prononcer ou non, là encore sur la question de la culpabilité) N'EST PAS UNE AFFAIRE PRIVEE. S'il y a un enseignement à retenir des luttes féministes de dénonciation des violences, notamment conjugal, c'est que ce qui se passe dans la sphère privée est politique, en ce sens que s'y jouent des relations de pouvoir. Pour violer ou tenter de violer une femme, le préalable est de penser qu'on a le pouvoir de le faire. Ces questions sont donc éminemment politiques.Quand au barouf médiatique, je suis d'accord avec vous c'est même la première phrase de cet article, qui ne dit pas autre chose que votre conclusion sur la question de la culpabilité de DSK

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  4. Je pense personnellement que pour vouloir tenter de violer ou de violer une femme il faut au préalable être malade. Le viol n'est pas d'ailleurs un phénomène qui ne touche que les femmes : il touche les enfants et les hommes. Je ne vois pas en quoi de façon général, un viol pose fondamentalement la question exclusive des rapports de pouvoir hommes/femmes. le lier comme tel c'est d'une certaine façon occulter ces pans.

    Faire du viol une thématique exclusivement lié aux rapports de genre est agir de façon réductrice. Après dans le cas des violences conjugales c'est autre chose. Là oui on peut considérer que ce qui est privé est politique. Quoique je ne serais à ce propos là pas systématiquement d'accord. Personnellement j'ai toujours des difficultés à politiser des affaires de droit commun.

    Le viol, comme le meurtre c'est pour ça que c'est un crime, c'est la négation de l'autre quelque soit son genre. L'autre est nié en tant qu'être humain, et non pas seulement en tant que femme.

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  5. Merci de vos initiatives et réflexions "Poupées en pantalon", ce commentaire est d'une lucidité exemplaire, je m'autorise à le mettre en lien sur mon mur FB,
    Noëlle Le Dréau

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  6. Peut-être que le silence qui est fait autour de cette femme que l'on appelle femme de ménage est du en parti au fait que l'on ne sait pas grand chose d'elle. pourquoi ? va savoir. Est-ce organisé par la justice américaine, pour éviter qu'on la harcèle de questions, pour garder la fraîcheur de son témoignage ? C'est surement une personne humble et peu habitué à ce déferlement journalistique qui l'attend... Après, l'habitude des journalistes est de dire des choses même si ils ne savent rien. Des bavards professionnels quoi...

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  7. un relai d'article :

    http://www.lepost.fr/article/2011/0...

    DSK : vers un rebond féministe?

    Pour aller à l’encontre de ce qui s’est dit ces derniers jours, il faut tirer les leçons de cette affaire pour faire avancer la cause du féminisme. Le choc, la violence, et l’intransigeance de la justice américaine ont permis de faire prendre conscience aux Français que la violence de genre est un acte d'une gravité extrême. Le précédent crée par cette affaire pourrait avoir des répercussions à long terme sur le rapport entre les hommes politiques et leurs homologues féminins, et le regard des Français sur ce type de violence. Alors que vendredi, en France, les humoristes traitaient à la légère ces thématiques, plus personne n’ose en rire.

    Les répercussions dépassent le cas personnel de Dominique Strauss-Khan ou le cadre des primaires socialistes et de la présidentielle. Coupable ou pas, peu importe, nous n'en sommes plus là. Les partis, en particulier de gauche, doivent prendre la mesure de l'onde de choc, se détacher du cas personnel de Strauss-Kahn, prendre de la hauteur et donner un sens politique à cet évènement.

    Pour cela, il faut que la gauche et en particulier les élues femmes réagissent vite. Et bien.

    Un signal fort lancé à tous les Français(es) pourrait être la rédaction d’une lettre ouverte des femmes élues, qui dénonceraient les violences de genre au sein du monde politique et de la société en général. Un front uni des femmes politiques qui pourrait proposer trois axes :

    - Oser dénoncer : créer un espace de témoignage à l’intérieur des partis par exemple une cellule spéciale violence de genre (harcèlement, etc...).

    - Oser être exemplaires : proposer l'inéligibilité et l'exclusion automatique des partis les hommes condamnés pour faits de violence à l’encontre des femmes, dans l’exercice ou non de leur mandat.

    - Oser s’affirmer : mettre le débat de l'égalité homme femme au cœur de la campagne de 2012. En mettant en avant des propositions plus ambitieuses pour le non respect de la parité et en proposant le renforcement des lois et des processus judiciaires pour accompagner et protéger les victimes présumées des violences de genre.

    Aujourd’hui c’est une leçon des Etats-Unis qui est donnée à la fois à notre monde judiciaire et politique, et à la manière dont la société française en général traite la violence de genre. Une porte est ouverte, à nous de l'enfoncer.

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  8. BRAVO pour ce super article, qui est à la fois un vrai coup de gueule énergique et une excellente analyse !

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  9. bravo c'est exactement ce que j'en ai pensé de cette affaire! et quand on sait aussi que ce Mr pourra peut-être s'en sortir car il a les meilleurs avocats US et qu'il peut payer une énorme caution! c'est encore plus révoltant! en tout cas il aura eu la trouille de sa vie et ça le calmera pour un bon moment, ésperons

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  10. @Rabah : Eh bien ma foi, si tous les hommes qui violent ou tentent de violer une/des femmes sont des malades, nous avons un sérieux problème. On dénombre en France environ 75 000 viols de femmes par des hommes chaque année... Cela me semble être un chiffre très important pour que ces actes soient le fait de seuls malades isolés. Le nombre de meurtre est riquiqui à côté. Pathologiser les violences faites aux femmes revient à les exclure de la sphère politique; c'est à mon avis une grave erreur.
    Il faut quand même être un peu sérieux avant d’écrire de telles choses : le viol concerne presque exclusivement les femmes et les enfants et le plus souvent dans le cadre de la famille. C'est notamment dans ce lieu que se jouent les rapports de pouvoirs entre genre.
    Refuser de faire de la question du viol une question de genre liée à la disponibilité et à l'appropriation du corps des femmes par les hommes est une grave erreur d'analyse, c'est refuser de tenir compte de tous les acquis du mouvement des femmes et à ce titre c'est être profondément antiféministe.
    je trouve assez drôle (si ce n'était pas si triste) que tu puisses penser qu'un viol n'est qu'une simple affaire "de droit commun"... On n'est pas dans une affaire civile de conflit de voisinage, il s'agit de violences. Penserais-tu par exemple qu'une affaire de détournement de fond est une affaire de droit commun (terme qui par ailleurs n'a aucun sens dans cette discussion). Le viol est un crime, il a été défini comme tel suite à des luttes féministe il ne faudrait pas l'oublier.
    Enfin dans ton premier commentaire tu sembles comparer un procès pour viol avec un simple procès civil. Est tu sérieux quand tu parles d'indemnisation de la victime ? Comme si c'était ce qui comptait dans de telles affaires !
    Qu'après toutes les luttes féministes sur les questions des violences on trouve encore des personnes pour écrire que le viol n'est pas une violence sexiste est assez ulcérant...

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  11. @Cultures-Cevennes : bien entendu, je pense que tu as raison. Je ne faisais pas référence à ce genre d'informations personnelles sur la victime mais plutôt au fait que l'ensemble du traitement médiatique était centré sur DSK et sur les conséquences que cette affaire pouvait avoir pour lui... Sans jamais se préoccuper de la question des violences qu'avaient peut être subies cette femme et des conséquence qu'un tel acte peut avoir sur une vie.

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  12. Solidaires avec les victimes femmes et enfants.
    SOS les MAMANS
    www.soslesmamans.com

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  13. c'est vraiment un très très bon article.

    L'un des meilleurs que j'ai pu lire jusqu’à présent. BRAVO ! et merci, c'est un précieux outil.

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  14. Deux minutes : je n'ai pas dit que le viol n'est pas une violence sexiste, j'ai dit que ce n'était pas QUE une violence sexiste. Il y a une nuance. Le viol est utilisé comme un instrument de domination homme femme, mais ça ne veut pas dire qu'il faut lier le viol exclusivement à la thématique des violence sexiste. Il y a aussi des hommes victimes de viols, c'est aussi utilisé dans le cadre de la violence contre les homosexuels, dans le cadre des tortures dans certains pays, en milieu carcéral, etc etc... Donc le viol n'existe que pour les femmes et les enfants, désolé c'est faux. Et le coté il y en a plus d'un coté que de l'autre je trouve aussi ça léger. Le viol c'est un crime contre l'humain, parce que ça rétrograde la personne au rang d'objet. Donc oui c'est dans le registre de la violence faites aux femmes mais pas QUE. C'est pour ça que ça fait partie des luttes que l'on mènent en tant qu'humain de façon universel et pas seulement en tant que féministe.

    Bon je me suis mal exprimé mais faut dire aussi que vous m'aidez pas. Je n'ai pas dit que ce que recherche une victime c'est une indemnisation. Après d'un point de vue morale la victime tirera aussi une satisfaction et une reconnaissance dans la punition du coupable, mais le procès pénal n'est pas une instance de vengeance, c'est avant tout le lieux ou la société juge un criminel, pour un crime fait contre le corps social dans son ensemble. Donc la victime en voyant le coupable puni d'une certaine façon obtient au delà de la punition du coupable, une reconnaissance de la société du crime qui a été fait et de la souffrance endurée. et l'indemnisation y participe aussi même si ça parait dérisoire. Voilà c'est mieux exprimé? Jamais au grand jamais je ne le réduit qu'à un procès civil, c'est pas mon propos loin de là.

    Moi ce qui m'énerve quand on politise les chose, c'est que l'on fait du viol une position politique. Or c'est une déviance, c'est pas une position politique. Après on est peut être pas sur le même plan donc expliquez moi ce que vous entendez par "politique".

    Et bon on est là pour débattre, donc c'est pas parce que j'exprime des positions qui ne sont pas les vôtres que je suis un adversaire des mouvements féministes.

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  15. Tout à fait d'accord pour dire que l'on est là pour débattre. Pourtant il y a là un désaccord fondamental : le viol ne peut être défini comme une déviance, une maladie mentale puisque justement cela naturalise cet acte.
    Je ne nie pas que d'autres personnes sont victimes de viols, je dis seulement que lorsque les femmes (qui ne représente pas qu'une "majorité" des victimes, mais environ les trois quarts) en sont victime il s'agit d'une violence sexiste qui vise à les réduire à l'état d'objet et à les priver de la libre disposition de leur corps. C'est la même chose pour les personnes homosexuelles ou pour le viol en milieu carcéral : il s'agit dans tous les cas d'affirmer son pouvoir sur quelqu'un, de le ou la remettre à sa place. Si une telle question n'est pas fondamentalement politique, je ne sais pas ce qui peut l'être. Le politique est relatif au pouvoir, le viol l'est. La lutte contre le viol est une lutte politique il ne s'agit jamais d'affaires privées.

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  16. @R.O

    Le viol est politique. C'est une arme de guerre de destruction massive des plus puissantes. Le ventre des femmes est colonisé par les vainqueurs. De part le monde entier, les femmes subissent le viol en masse, que ce soit en temps de paix ou de guerre. Le viol est une arme de domination, d'humiliation, d'asservissement et de contrôle. 75 000 femmes sont violées chaque années en France.

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  17. @ gloup :

    Le viol est une arme politique c'est vrai, et ça été utilisé comme tel, les exemple dans le monde foisonne. Ce qui me gêne c'est de prendre le viol de façon globale comme quelque chose de politique et d'en faire une lutte en soi. En fait on le lie quasi uniquement au registre de la violence faites aux femmes (et c'est parce que les féministes ont contribué largement à publiciser ce problème), mais aujourd'hui en 2011 il faudrait élargir la lecture qu'on a du viol pour en épouser tout ses aspects : aborder la question du viol carcéral (j'ai lu une stats comme quoi 22 à 25% des détenus américains ont fait l'objet d'un viol, c'est tout sauf négligeable), en fait l'aborder de façon universelle justement pour en faire quelque chose de "déviant" "d'anormal" quelque en soit les circonstances.

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  18. Alors... au risque de me répéter, j'explique à nouveau.La question n'est pas d'analyser ou non le viol exclusivement comme un crime sexiste. La question est de refuser de le qualifier de déviance ou de maladie comme tu persistes à le faire. Quand on viole quelqu'un (femme, homme ou enfant) on se sert du pouvoir que l'on a sur lui ou sur elle, se sont de rapport de domination ou d'exploitation qui se jouent et non des problèmes individuels. Analyser le viol comme une déviance revient à dire que c'est comme ça qu'il n'y a rien à faire : le violeur est simplement un malade mental. Qu'il s'agisse du viol conjugal, des agressions dans la rue, du viol carcéral, du viol punitif d'homosexuel-le-s c'est à chaque fois une question politique qui se joue. Je ne vois pas l'intérêt de faire intervenir la question de la norme ou de la déviance la dedans. Les normes et les déviances sont caractérisées comme telles en fonction des époques... Il n'y a pas si longtemps certains partis de gauche prétendaient que l'homosexualité était... une déviance justement qui disparaitrait d'elle même après le capitalisme. Qualifier un comportement de déviant c'est renoncer à lutter contre lui à l'échelle de la société. Une fois qu'on a dit que le viol était "anormal" comme tu dis, on n'a rien dit. Pour quelque chose d'anormal c'est drôlement fréquent d'ailleurs. Je répète : le viol (quel qu’il soit) est une question politique parce que s'y jouent des rapports de pouvoir et de domination. Et cela est vrai dans la rue, dans les foyers, dans les conflits armés ou en prison.

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  19. R.O

    Si je comprends votre point de vue dont j'approuve l'universalité, pour autant il ne faut pas oublier que le viol carcéral contre un homme ne peut être possible que cet homme est envisager comme une étant une femme. Cette humiliation là étant réservée aux femmes, c'est une manière de lui faire comprendre qu'il n'est rien.

    La base de cette conscience universelle que vous appelez de vos voeux, serait tout au contraire tout au contraire de mettre jour la spécificité et les mécanismes misogynes de cette violence.

    Tout comme l'homophobie : la base de cette discrimination est de traiter ces hommes homos de "femmelettes".

    Tant que les femmes seront vue comme des êtres inférieurs dans l'humanité, se feront jour de multiples discriminations et violences qui, assimilées aux "sous-êtres" que sont les femmes, pourraient prendre de multiple visages.

    Il faut valoriser le féminin, mettre en valeur les femmes, cesser de les humilier, pour sortir de cette curée mondiale.

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  20. oups !

    désolée pour ce dernier commentaire totalement incompréhensible....
    Trop pressée, pas pris le temps de relire...

    Au temps pour moi :)

    En tout cas, merci les poupées en pantelons pour votre clarté (lol) et la justesse de vos remarques :)

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  21. C'est bien la première fois depuis plusieurs jours,qu'un article résume aussi bien mes pensées. Merci et bravo pour cet article.

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  22. Bravo Marie pour cette article, prenons l'exemple du "Loup et de l'Agneau" : La raison du plus fort est toujours la meilleure :
    Nous l'allons montrer tout à l'heure.
    Un Agneau se désaltérait
    Dans le courant d'une onde pure.
    Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure,
    Et que la faim en ces lieux attirait...
    Eliane

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  23. Christine Delphy24 mai 2011 à 05:27

    A propos de "droit commun" : la personne qui pense que "droit commun" veut dire "privé" se trompe. Le Droit commun, c'est le droit commun à tous/toutes. En termes juridiques, droit commun s'utilise pour distinguer les détenus de droit commun des détenus ressortissant d'autres droits : les détenus politiques par exemple. Autrement, tout le monde est "de droit commun". Un meurtrier en prison est un détenu de droit commun, comme un détenu pour un vol à l'étalage. Par ailleurs, la distinction public/privé est très floue; ici ce qui est important, c'est la distinction légal/illégal. Un viol est illégal, mieux, c'est un crime. Les gens qui parlent du "mur de la vie privée" veulent dire en fait que tout ce qui a trait à la sexualité doit être en dehors du domaine de la possible punition. C'était hélas le cas, ça l'est de moins en moins: non on n'a pas le droit de violer un enfant, même si c'est "le sien", même si ça se passe entre quatre murs; non on n'a plus le droit de battre une femme, même si c'est "la sienne". La notion de privé servait aux policiers et aux procureurs à refuser de protéger le droit de certaines personnes, les femmes, les enfants, sous prétexte de protéger la "vie privée" de leur agresseur : en somme, la vie privée c'était, et c'est toujours dans une certaine mesure, le droit des hommes de traiter "leur"s femmes et "leurs" enfants comme des possessions. Maintenant on protège la "vie privée " de DSK. La vie privée ne devrait être protégée que quand il s'agit de goûts et de pratiques qui ne portent pas atteinte aux droits d'autres personnes. Ca paraît évident, mais cela ne l'est pas, ni dans les pratiques ni dans les esprits.De ce point de vue, les Etats-Unis sont bien plus au clair que la France, et en avance en ce qui concerne l'égalité des droits : les femmes ont le droit de ne pas être violées.
    Sur les différence réelles ou supposées entre le droit américain et le droit français, j'ai fait un article. Vous pouvez le reprendre : http://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2011/05/23/qui-accuse-qui-dans-l%E2%80%99affaire-strauss-kahn/

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  24. @ Christine Delphy

    Il y a un truc que j'ai du mal à comprendre. Je suis tout à fait d'accord sur la définition de "droit commun", d'ailleurs c'est dans ce sens que je l'utilise, pour dire que le viol n'est pas un crime politique mais un crime de droit commun.

    Cependant, quand vous parlez du "mur de la vie privé" invoqué par certains pour soit disant soustraire à la justice les affaires de viols et d'agression sexuelle là je ne vous suit plus. Je n'entend pas le "droit à la vie privé" dans ce sens, sinon il n'y aurait pas que les viols et les agressions sexuelles qui resterait impuni : tout les crimes et délits ne le serait plus. J'entends le droit à la vie privé comme le fait que l'on ne déballe pas l'ensemble de la vie sexuelle avérée ou supposée, de même que l'ensemble de ce procès sur la place publique. Je suis contre trainer les violeurs sur la place publique, de même je suis contre que l'on filme leur procès, et je suis contre que l'on les lynche collectivement. Donc oui dans ce sens je suis d'accord que l'on respecte la vie privé de DSK. Après si l'on commet des crimes dans sa vie privé on doit être puni, sans pour autant que celle ci fasse l'objet d'un déballage en publique.

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  25. J'entends le droit à la vie privé comme le fait que l'on ne déballe pas l'ensemble de la vie sexuelle avérée ou supposée, de même que l'ensemble de ce procès sur la place publique. "Je suis contre trainer les violeurs sur la place publique, de même je suis contre que l'on filme leur procès, et je suis contre que l'on les lynche collectivement. Donc oui dans ce sens je suis d'accord que l'on respecte la vie privé de DSK. Après si l'on commet des crimes dans sa vie privé on doit être puni, sans pour autant que celle ci fasse l'objet d'un déballage en publique."

    Si l'on assiste à cela dans cette affaire c'est parce qu'il s'agit d'un homme public. DSK n'était pas un inconnu avant cette affaire, je ne vous apprends rien. La presse se rue sur cette histoire non pas pour trainer un violeur dans la boue (^^ ça se saurait...) mais bien pour vendre du papier. Ça aurait été un pekno lambda tout le monde s'en tamponnerait le coquillard.
    Pour que des violences sexuelles suscitent l'indignation populaire, il faut soit qu'il s'agisse d'enfants (on ne plaisante pas avec la pédophilie) soit qu'il s'agisse de viol accompagné de tortures ou d'actes de barbarie (genre les violeurs meurtriers en série) ou bien encore que le violeur soit un immigré (ces arabes y sont pas civilisés hein).
    Pour finir, il est un peu grotesque de réclamer le droit à une vie privée pour un homme public qui se retrouve mêlé à un procès. Vous viendrait-il à l'idée de vous indigner du déballage de la vie privée de madame Bétencourt dans le canard enchaîné? C'est vraiment trop moche que le fait qu'elle soit totalement gâteuse soit ainsi étalé dans tous les journaux...

    Sinon merci pour cet article, je partage tout à fait cet avis.

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  26. J'en profite pour dire toute mon admiration pour Mme Delphy. Et lui adresser mes remerciements les plus sincères.
    Je suis à chaque fois que je lis un de ses écrits, émerveillée (bien qu'effrayée) de la justesse et de la finesse de ses analyses.

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  27. L'actualité vient de démentir en partie les propos de Christine Delphy à propos du droit des femmes américaines à ne pas être violées : Elles ont bien ce droit, à condition d'être des victimes irréprochables... Ce qui les place en position d'inégalité vis-à-vis du coupable présumé, qui, lui, a le droit de garder le silence. Ce qui lui évite de se contredire.
    Y'a encore du boulot...

    Jean-Marie Crohin

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