9 mars 2011

Chantal et l'emploi

En ce moment, on trouve un peu partout, répandue sur la Toile, cette info fatidique : selon un récent sondage de l'INSEE, 25% de la population française pense qu'en temps de crise économique -maintenant, quoi- la priorité doit aller aux hommes pour l'emploi. Bin oui, de l'emploi, il n'y en a plus pour tout le monde, alors il faut faire des choix et décider qui est prioritaire pour ramener des « sousous dans la popoche »(1).


Notons qu'il est nettement mis en exergue le résultat « un quart pour ». Et les trois quarts contre alors ? Tout juste bons à faire cuire des quatre-quarts ? Voilà qui m'étonnerait fort. J'admets volontiers, en revanche, que le Figaro et cie soient nuls en fractions.

N'empêche que, malgré les paraphrases dégueulées sur les sites et les blogs clamant que les mentalités changent, surtout les jeunes, y a du progrès, donc tout va bien madame la Marquise, la parité est sauve, il est bien martelé de façon insidieuse que, décidément, le Français aura l'avantage sur la Française au taff. Un sur quatre, mais il gagne. L'efficacité des épandeurs, là est le progrès.

Il y en a qui renversent le café sur leur clavier tant leurs doigts tremblent, mais c'est un accès de terreur sage, rassurez-vous, ça va passer. Les internautes, oreilles rougissantes, s'indignent raisonnablement de cette idée complètement rétro, démodée, à l'heure où l'on dit que c'est pourtant arrivé, dans la France du XXIe siècle, Hommes et Femmes sont égaux, à part que Bruno gagne plus que Chantal alors qu'ils occupent des postes similaires, dans la même boiboîte.

Ainsi, entre deux bouchées de tartine beurrée (allégé, le beurre, parce que Bruno a du cholestérol) préalablement trempée dans le Nespresso (what else ?(2)), on lâche un petit com' vite fait, qui casse pas trois pattes à un canard, mais bon, pas le temps, et puis on a déjà passé plusieurs minutes à choisir un pseudo fashion pour cancaner.
Certes, des com' qui se veulent éclairés, il y en a quelques-uns qui traînent.
Leur teneur : comment a été effectué l'échantillonnage ? Combien de personnes, avec quelles caractéristiques ?
Mais ces réactions molles ne sont que quelques bombes de déo bon marché vaporisées par-dessus le lisier.

Or, tous ces miasmes émanant de la Toile me font tousser comme une tuberculeuse, moi qui admire la beauté des araignées; je leur envie souvent leurs multiples pattes ainsi que leur habileté au tissage. Je crache mes poumons et un peu d’encre virtuelle car, figurez-vous que, de toute cette petite fourmilière fourmillante, occupée à gueuler contre la termitière d'à côté qui fait concurrence, personne ne semble se poser la question suivante : à quoi joue l'INSEE en faisant une étude pareille ?!!

En effet, quid de la discrimination tant illégale qu'illégitime en fonction du sexe ? Et mes compétences, c'est du boulet ?! So long pour la méritocratie. L'égalité des sexes, c'est bel et bon quand tout va bien, l'appétit, le taux de croissance et la natalité. Mais là, c'est la Crise, alors, Femme, enfile ton tablier de bonne et reste à la maison, et laisse l'Homme en cravate pro travailler. Je serais curieuse de savoir où sont placé-e-s les trans' dans cette jolie étude bien binaire, qui en réalité ne met rien du tout en cause, et n'illumine qu'une seule chose : son inanité en noir et blanc.

Car voici ce qui me semble être le véritable problème. Primo, cette question suggère l'idée obsolète de la guéguerre professionnelle nénettes versus gars, qui en plus de cette manie de priver les gens de leur libre arbitre et de possibilités, au nom d'un système bon à foutre à la poubelle, est l'un des aspects bien rabâchés de l'amalgame entre le sexe et la face social que doit arborer chacun-e. Secundo, l'existence de cette fameuse question, apparemment, ne choque personne. Quoi de mieux pour illustrer que l'éventualité de cette discrimination est encore et toujours bien ancrée dans les cerveaux, à l'encre de Chine, et considérée comme normale ? Dans une société dépourvue de ces schémas sexistes et patriarcaux, cette idée serait inconcevable, tout au plus risible, et des lois anti-discrimination ne seraient même pas nécessaires.

En prolongeant cette ligne, lorsque je tente de me pencher sur d'autres questions dégoulinant du même fond de tonneau, celui qui gâte le palais et rend la langue pâteuse, avec cet arrière-goût d'essentialisme douteux, du type « une femme peut-elle s'épanouir sans avoir des enfants ?» ou « les garçons sont-ils meilleurs en math ? » je parviens à la même conclusion consternante.

Sur ce, je vous laisse continuer à déconstruire les idées toutes faites, j'ai un soutien-gorge rembourré et quelques torchons à cramer.


Maya


(1)  Titre d'un sketch des Inconnus parodiant les jeux télévisés.
(2 ) Ah, Georges Clooney et l'univers fascinant de la pub...

1 commentaire:

  1. Oui ben c sur faut réserver les emplois pour les hommes et je dirai même plus pour les hommes blancs et encore, je trouve qu'il faudrait aussi éliminer tous les hommes sans enfants (même blancs, y servent à rien d'autre qu'à eux-mêmes donc à rien). Et puis bon tant qu'à pas leur donner de travail faudrait carrément les éliminer totalement de toute façon on va pas entretenir tous ces assistés sans travail faut pas déconner.
    Oups, en tant que femme faut vite que je me trouve un petit mari pour m'entretenir, un blanc de préférence et va falloir pondre tout de suite (moi qui voulait prendre mon temps et qui était pas sure de vouloir des enfants, y a plus le choix maintenant...)
    Ce genre d'article me rend dépressive vite mon Xanax...

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