26 avril 2010

De l'art de la chasse aux gens pas comme nous.


Ca y est. Je leur demande officiellement d’arrêter.

Sérieusement si Nicolas Sarkozy et ses amis (j’entends par « amis » une vaste masse notamment composée d’hommes et de femmes politiques de tous bord et de représentants des « forces de l’ordre » comme on dit) continuent comme ça, je ne saurais plus où donner de la tête. Là comme ça, à deux jours d’intervalle ils nous donnent deux raisons de parler d’eux et sur le même sujet en plus.
Et le sujet, quel est il ? Je vous le donne en mille… le voile intégral. Bon d’accord c’est sans surprise.


Plus personne n’ignore qu’après des semaines de « débats » (lesquels, s’ils sont factices et ont oublié de donner la parole aux premières personnes concernées ont au moins eu l’appréciable qualité d’effacer toute autre question du débat public), le Chef de l’Etat a tranché.
Oui, oui, il a décidé, il est fort, il n’a pas peur, même pas de l’avis de la plus haute juridiction administrative française. Mais qu’a-t-il donc tranché ce grand homme ? Le tissu. Nous l’attendions tous, c’est fait. Le "Président de la République française" a décidé que le port du voile intégral devait être interdit sur tout le territoire national. On respire mieux tout de suite, on est soulagé-es.

Ca, c’était mercredi. Et deux jours après, que se passe-t-il ? La fameuse loi, annoncée, non votée, même pas encore écrite est déjà appliquée ! Les fonctionnaires de police sont réputés pour être zélés mais là ça dépasse toutes nos espérances. Donc pour récapituler : mercredi Nicolas Sarkozy se prononce en faveur de l’interdiction générale et vendredi deux policiers verbalisent une automobiliste qui portait le voile intégral en conduisant. Ca réduisait son champ de vision paraît-il. Quelle rapidité, quelle efficacité. La création du droit en France obéit à des modalités et des procédures qui me laissent comme deux ronds de flan. Moi qui croyais naïvement qu’il fallait rédiger un projet de loi et le soumettre aux deux Assemblées pour une procédure de navette parfois longue. Me suis plantée. Nicolas dit, la police fait. C’est quand même plus simple et ça se résume vite : le droit, c’est lui.

Mais comme l’a dit Fillon, « si on est convaincu qu’il s’agit d’un problème de dignité, on peut pas s’embarrasser de prudence, on est prêt à prendre des risques juridiques ». Des risques juridiques. Traduit ça donne : les droits de l’homme, on est prêt à s’asseoir dessus. La dignité ? Le gouvernement qui s’intéresse à la dignité des femmes, ça c’est du scoop.
Mais de quels risques parle-t-on ? Le Conseil d’Etat a estimé qu’une telle loi ne trouverait pas de fondement juridique qui soit incontestable.

On peut raisonnablement s’attendre à ce qu’une loi interdisant totalement le port du voile intégral soit censurée d’une manière ou d’une autre, à un moment ou à un autre, par une juridiction nationale ou européenne. Alors pourquoi parler d’une loi qui sera probablement censurée et surement inapplicable dans les faits ? Quelques semaines après des élections dont les résultats ont été plutôt mauvais pour l’UMP et plutôt bons pour le FN, on sent l’envie de partir à la pêche aux électeurs. Alors c’est reparti pour un tour de discours sécuritaires et de projet de loi stigmatisant les femmes musulmanes et réprimant encore et toujours celles dont on dit qu’elles sont les victimes.

Comme cela ne pouvait s’arrêter en si bon chemin, on découvre samedi que le mari de la femme qui portait le niquab, que les policiers ont verbalisé parce que Sarkozy a dit que le voile intégral c’est pas bien, ce mari là donc ; était polygame. Monsieur le Ministre de l’Intérieur a donc demandé à Monsieur le Ministre de l’Immigration de déchoir ledit mari de la nationalité française, qu’il avait acquise depuis 1999. Parce que la polygamie c’est une atteinte à la dignité des femmes et qu’en France on rigole pas avec ça.

Moi je dis que si tous les hommes suspectés de mal traiter les femmes en France étaient déchus de leur nationalité…bah y aurait plus beaucoup de français.
Alors peut être que finalement toute cette histoire n’a que peu à voir avec les femmes, nos droits et notre dignité.



Marie

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